Le 21 Juin dernier, le ministre Hervé Novelli a convié les Maitres-Restaurateurs à Bercy pour ce genre de grande messe que le pouvoir affectionne. Autocongratulations et remise de médailles en sont l’essence même. A cette occasion, le millième titre a été décerné à un restaurateur de l’Indre. C’est aussi ce moment qui a été choisi pour lancer l’Association Française des Maîtres-Restaurateurs. Je n’y étais pas et j’en ai donc lu le compte-rendu dans le magazine « l’Hôtellerie » daté du 24 juin. Je cite l’éditorialiste de ce journal : « cette reconnaissance officielle d’un titre qui mit du temps à s’imposer traduit à la fois la qualité de ses bénéficiaires et conforte l’image d’un statut qui est loin d’être une breloque de plus dans le paysage fourni de la cuisine, ou l’on n’est pas avare de médailles. » Je souscris tout à fait à cette analyse.
Sur une des photos illustrant cet article, on peut reconnaître trois éminentes personnalités de la restauration française : Francis Attrazic, le président des Restaurateurs de France, Claude Izard, le président des Cuisineries Gourmandes et enfin Jean Lanau, le président de Tables et Auberges de France. J’ai le plus grand respect pour les deux premiers, syndicalistes de toujours, l’un a l’UMIH et l’autre à la CPIH. J’ai par contre les plus grandes difficultés à cerner les motivations qu’a eu le troisième, ancien hôtelier responsable des Logis, à créer il y a une quinzaine d’année sa propre association, que je qualifierai poliment d’un peu fourre-tout.
Les deux premiers groupements ont fait ensemble le même constat qui est à l’origine de la création des Maîtres-Restaurateurs : le manque de reconnaissance envers le public des établissements dignes de ce nom de Restaurateur, nom qui n’est toujours pas protégé. Par la réalisation d’une charte de qualité ou des audits, ces messieurs se sont démenés pour imposer leurs labels. Ils n’ont jamais vraiment atteint leur but, et pour plusieurs raisons, à savoir :
• Le fait qu’ils soient deux, chacun étant l’émanation de deux syndicats concurrents. Au lieu de se regrouper et de se rendre incontournables auprès des pouvoirs publics !
• Leurs adhérents sont toujours de bons professionnels, mais le plus souvent provinciaux dans un style classique. Et ils sont trop souvent oubliés des grands guides qui ne font pas leur travail. Ces chefs authentiques y voient une manière de se distinguer ; mais leurs confrères plus médiatisés qui n’ont pas saisi l’impact militant de ces associations, ont une fâcheuse tendance à les considérer comme ringardes.
• L’absence de reconnaissance officielle d’un titre reconnu avec des avantages substantiels.
• Enfin le montant des cotisations obligatoirement élevées, – surtout quant on connaît le coût de l’édition de guides attractifs, mais qui sont pourtant restés confidentiels dans leur diffusion.
Francis Attrazic et Claude Izard ont donc enterré la hache de guerre pour occuper respectivement la présidence et la vice-présidence de cette nouvelle association. Quelques questions se posent :
Fallait-il une association nationale des maîtres-restaurateurs ? La réponse est oui, afin de servir d’interlocuteurs aux pouvoirs publics, de coordonner la communication et de faire évoluer la charte. Cependant je pense qu’il aurait mieux valu, dans un premier temps, inciter à la création d’associations départementales plus dynamiques sur le terrain, – animations diverses, collaboration avec les CDT ou autres organisations institutionnelles afin de représenter les départements à l’extérieur, organisations de soirées de prestige… Cela inciterait les bons restaurants à demander le titre ; en effet, ces associations locales seraient bien médiatisées et l’ambiance y serait ludique. L’association nationale fédérerait ces entités départementales. Commencer par le sommet ne me parait pas être la bonne solution en termes d’efficacité et le coût pour l’adhérent risque de s’en ressentir. Pour être attractive, le montant de la cotisation à ces associations ne devrait pas dépasser 150 euros par an.
Ces deux personnages sont-ils légitimes pour prendre les rênes des maîtres-restaurateurs de France ? Oui, si l’on considère leur travail et leur militantisme passé pour en arriver là. Mais survient un petit bémol, à savoir que l’un comme l’autre sont à l’âge de la retraite et ne sont plus restaurateurs en exercice. On se consolera de l’image présentée, peu dynamique, en pensant qu’ils auront du temps. Une condition s’impose aussi : qu’ils sabordent Restaurateurs de France et Cuisineries Gourmandes. Cela me parait indispensable, et pourtant, je ne l’ai vu évoquer nulle part. Comment peut-on imaginer que subsiste en parallèle trois associations avec des objectifs semblables, surtout si les dirigeants en sont les mêmes ? Comment empêcher la suspicion de conflit d’intérêt ? On pourrait penser, uniquement si on avait l’esprit mal placé, que les deux amis ont eu le désir de contrôler une nouvelle organisation susceptible de concurrencer leur « bizness »…
ils ne saborderont pas Restaurateurs de France et Cuisineries Gourmandes pour la simple est bonne raison que les cotisations tombent, alors pourquoi s’en passer?
On devrait mettre en avant des professionnels qui sont encore en place et non des retraités car ils ne représentent plus cette profession qui a bien changé.
Merci pour ce billet instructif. Comment se fait il que ce label soit si méconnu du public ? Je n’en ai appris l’existence qu’en regardant le dernier Envoyé Spécial qui fait froid dans le dos. J’ai fait un billet sur ce thème dans mon blog. A bientôt !
Ghislaine, Votre Blog est tres beau. Ce label est meconnu parce que la pub n’en as pas ete faite et que ces derniers temps les restaurateurs sont plus souvent assimilé à l’affreux que au méritoire
Merci :). Vous avez pourtant des valeurs à défendre et un beau métier à valoriser, ne baissez pas les bras ! Une grande partie de notre culture est accessible dans les restaurants de qualité, j’espère que vous trouverez les armes pour vous battre efficacement. En tout cas bravo pour ce que vous faites et bon courage à vous.