illustration Sébastien Vandermarker
Les animaux de Jean de La Fontaine, ayant attrapé la peste, se persuadèrent que le ciel leur avait envoyé cette maladie pour les punir de leurs crimes, et de ce fait, ils se mirent en quête du plus coupable.
…« Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux,
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
L’histoire nous apprend qu’en de tels accidents
On fait de pareils dévouements :
Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence
L’état de notre conscience » …
De même, sur la grippe porcine, il est venu le temps de faire pareil travail.
Je dédouane de suite le cochon, c’est un des animaux que je préfère.
Comme Jean Lassalle, je l’ai connu et apprécié depuis mon très jeune age, et malgré sa vue basse, je suis certain de son intelligence.
Le pourceau n’était-il pas déjà présent dans le jardin d’Epicure ? Même si la légende a été construite par ses ennemis afin de le fustiger, il sert de ralliement à ceux qui, comme moi, ont quelques sympathies pour ce philosophe.
Dans cette affaire, le cochon est la victime d’un crime horrible. Pas celui qui le fait finir dans nos assiettes, – c’est dans l’ordre des choses. J’en connais des hordes en Corse, en Bigorre, au Pays Basque ou en Espagne qui vivent parfaitement heureuses avant de nous donner leurs extraordinaires jambons. Le crime est dans les conditions d’élevage que l’on prétend moderne.
Dans LeMonde.fr, un article du 28 avril nous parle d’une vallée du Mexique où une filiale d’une société américaine – plus grosse productrice mondiale de porc et déjà condamnée aux états-Unis pour non-respect de l’environnement, élève annuellement 950 000 pourceaux. Certains pensent que c’est de cet endroit-là que serait venu le virus. Stress, promiscuité, et utilisation massive d’antibiotiques ; les conditions sanitaires y sont scandaleuses. Des millions de mouches se nourrissent des charognes qui pourrissent à l’air libre. Depuis plusieurs mois, la population s’est plainte de pneumonies et autres maladies infectieuses à répétition – deux bébés en sont morts, dans l’indifférence générale des autorités. Des plaignants ont même été inculpés !
Les gens qui travaillent dans ces « usines » à cochon sont des petits paysans acculés à la misère. Je ne sais pas si on peut les appeler « éleveurs », en tout cas, ils sont aussi des victimes. Il est significatif de constater que ces élevages de porcs ou de volailles, – après avoir, durant des décennies, pollué la Bretagne sans enrichir les paysans qui s’y sont livrés, se délocalisent de plus en plus dans les pays pauvres. Fils de paysans, je sais l’amour des bêtes qu’ont la plupart des éleveurs, et je suis sûr que ceux qui le pratiquent dans ces conditions ressentent de l’écoeurement.
Les Consommateurs ne sont pas coupables non plus. Piétaille américaine à qui on a fait des crédits insensés avant de l’expulser et la mettre au chômage, pressurés à fond il faut bien qu’ils se nourrissent. Ils vont remplir, obèses, les chariots des magasins hard-discount de charcuterie bon marché, mais encore trop chère par rapport à la qualité.
Vous l’avez compris, le coupable est le capitalisme sauvage et mondialisé qui, pour nourrir les magnats de la bourse, fait produire de pauvres aliments par des pauvres gens à destination d’autres pauvres gens. Pour ce faire, il prend des risques sanitaires insensés, joue à l’apprenti sorcier, ici avec des cochons, ailleurs là avec des poulets, ailleurs avec des vaches qui vont devenir folles, enfin avec du maïs transgénique.
J’en étais là de mes réflexions, quand je tombe sur une interview lue dans LeMonde.fr, datée du 4 mai, interview du Directeur de la santé animale et du bien-être des animaux à l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Vous savez, l’AFSSA, cet organisme public qui blanchit le maïs Monsanto. Ce monsieur pense que « le développement des élevages intensifs, où des centaines de milliers d’animaux peuvent être confinés dans des espaces réduits, n’augmente pas le risque de propagation des maladies animales à l’homme ». Il affirme de même que « dans les grands élevages où les conditions de biosécurité sont strictement appliquées et où il existe un système de filtration absolu de l’air empêchant les virus d’être introduits par voie respiratoire, le risque est moins grand que dans certains élevages de type extensif, en contact avec la faune sauvage, pour lesquels il est beaucoup plus difficile de gérer l’introduction de maladies exotiques ou épizootiques. »
On est vraiment rassuré ! Dormez, braves gens…
Du coup, j’ai perdu mon fil !
C’était quoi au fait la morale de la fable de ce bon Monsieur de La Fontaine ? Ah oui :
« Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »
thumbs up ! Une réserve toutefois : même un budget serré peut se permettre de mieux consommer. Personne ne nous contraint à acheter les horreurs qu’on tente de nous faire avaler, quand même.
Acheter moins de viande, moins de produits animaux, qui coûtent cher à notre porte-monnaie, à l’environnement… et aux animaux,
libère un budget pour des produits sains et nourrissants : légumes, légumineuses, herbes, céréales.
je suis vraiment flatté que vous aillait cette illustration pour votre blog mais la prochaine fois citer son auteur ça fera encore plus plaisir merci.
L’auteur donc c’est moi : Sébastien Vandermarker ; voila un oubli rectifier,
au plaisir sur votre blog 😉